Le parcours du professeur Eric Weissman n’a rien de banal. Cet ancien sans-abri toxicomane a reçu de la part de l’Association canadienne pour les études supérieures le Prix d’excellence 2014 pour sa thèse de doctorat, la meilleure du pays.
Eric Weissman avait tout pour bien réussir sa vie. Issu d’un bon milieu, déjà titulaire d’une maîtrise en sociologie, cet homme a pourtant vu sa vie basculer dans les années 80. Ont alors suivi une dizaine d’années sombres au cours desquelles il a été aux prises avec des problèmes liés à sa consommation d’alcool et de cocaïne. Après avoir connu l’itinérance à Toronto, monsieur Weissman s’est laissé convaincre par sa sœur d’aller chercher de l’aide en 1993.
La clé de son rétablissement? Un logement de transition, financé par le gouvernement ontarien, où il a trouvé l’aide dont il avait besoin, notamment par l’entremise d’une psychothérapie et de thérapies de groupe.
De la rue à l’université
Fort de son expérience de vie et désireux de savoir s’il y avait un endroit au Canada où les sans-abris étaient bien accueillis, le doctorant a fait des recherches et des vidéos sur le sujet pendant près de 13 ans. Muni d’une caméra, il a sillonné les allées du village de tentes de Toronto, filmant les gens qu’il y avait connus et qui ont accepté de lui raconter leur histoire.
Un documentaire a d’abord été réalisé et présenté au Musée royal de l’Ontario, ce qui lui a permis de reprendre ses études de doctorat à l’Université Concordia et de rédiger sa thèse. Le document qui, selon l’Association canadienne pour les études supérieures, « constitue une étude riche et concrète sur les communautés intentionnelles de sans-abri comme les bidonvilles et les camps de tentes », aborde le sujet sous différents angles, soit les sciences politiques, les politiques publiques, l’urbanisme et la santé mentale.
On dénombre au Canada plusieurs histoires de réussite de gens qui sont parvenus à reprendre pied, et ce, grâce aux différentes ressources destinées à les aider. Qu’il s’agisse de solutions d’hébergement, de retour à l’emploi ou de réintégration sociale, de services alimentaires ou de différents programmes permettant de mettre fin à une dépendance, il existe plusieurs moyens de s’en sortir.
Au Québec, la Société d’habitation du Québec contribue à sa manière à aider les gens en situation d’itinérance à reprendre leur vie en main. Ainsi, par l’intermédiaire des programmes Supplément au loyer et AccèsLogis Québec – volet 3, des organismes d’aide sont en mesure de construire :
- des logements temporaires ou de transition pour les personnes qui poursuivent une démarche de réintégration sociale et d’apprentissage de l’autonomie en logement;
- des lieux d’hébergement d’urgence (chambres), tels des refuges pour personnes itinérantes, femmes victimes de violence ou personnes en difficulté;
- des logements temporaires pour femmes ou jeunes victimes de violence familiale.
Pas moins de 35 000 Canadiens sont sans abri chaque soir et plus de 235 000 Canadiens vivent l’itinérance au cours de l’année. De ce nombre, 5 000 personnes sont sans refuge, 180 000 utilisent les services d’hébergement d’urgence et 50 000 sont hébergées provisoirement (par exemple, dans une maison d’hébergement, chez des amis, dans leur famille, dans une institution ou dans une chambre de motel).
Source : L’état de l’itinérance au Canada 2014, Homeless Hub.
Selon L’itinérance au Québec – Premier portrait, publié en 2014, l’addition et l’interaction de plusieurs facteurs, dans la vie d’un certain groupe de personnes, peut mener à l’itinérance. Ainsi, le revenu, l’insécurité alimentaire, le logement et le réseau d’entraide ont été désignés comme étant des déterminants structuraux de l’itinérance, qu’on retrouve sous trois formes :
- situationnelle, qui fait référence à la situation de personnes qui, après avoir été un certain temps sans abri, parviennent à se reloger;
- cyclique, qui fait référence à la situation de personnes qui alternent entre la vie dans un logement et la vie dans la rue;
- chronique, qui correspond à la situation de personnes qui sont sans logement depuis une longue période. Il s’agit de la forme d’itinérance la plus visible et bien qu’elle soit moins fréquente que l’itinérance situationnelle, elle exigerait de nombreuses interventions et engendrerait des coûts sociaux importants (L’itinérance au Québec – Premier portrait, p. 4)